Donner de l’information sur les drogues dans une teuf, n’est-ce pas de l’incitation ?
En milieux festifs, la Réduction des Risques (RdR) consiste à donner aux publics des informations et des moyens leur permettant d’améliorer leur santé et leur bien-être, et d’en devenir acteur∙rice∙s. Son domaine d’intervention est large : santé sexuelle, risques auditifs, risques d’accidents… en passant par la consommation de produits psychotropes, légaux et illégaux.
Ce dernier volet crée un amalgame, laissant percevoir les actions de RdR comme de l’incitation à la consommation. Pourtant, lorsqu’un∙e professionnel∙le explique comment fonctionne un préservatif, il ne s’agit pas d’incitation à avoir des rapports sexuels. Il en va de même pour les informations et le matériel relatifs aux produits, qui sont toujours accompagnés de conseils de RdR donnés par des professionnel∙le∙s ou bénévoles formé∙e∙s, et uniquement destinés aux personnes consommatrices. Informées et outillées, les personnes feront leurs propres choix.
Le tabou qui subsiste autour de la consommation de produits entrave l’accès des personnes à une information juste et non jugeante. Parler de sa consommation à un∙e professionnel∙le de la santé n’est pas toujours aisé.
L’interdit légal rend également très complexe le travail des intervenant∙e∙s en RdR avec les organisateur∙rice∙s de soirées. Ces dernier∙e∙s se trouvent dans une position paradoxale : devoir interdire la consommation de produits dans leurs lieux, tout en offrant à leurs publics un cadre sécurisant et favorable pour leur santé et leur bien-être et ce, notamment en cas de consommation. Il peut sembler contradictoire à un∙e organisateur∙rice de collaborer avec des acteur∙rice∙s de RdR alors même que son événement est supposé être, à sa connaissance, exempt de consommation. Ce frein est bien réel et empêche parfois les intervenant∙e∙s de mener leurs actions lors de fêtes auxquelles leur présence serait pourtant nécessaire à la bonne réussite de la soirée.
Le milieu festif est, pour de nombreuses personnes et depuis toujours, l’endroit où se détendre, lâcher prise et réaliser de nouvelles expériences : sociales, physiques et psychiques. Il est utopique de penser qu’un jour la consommation de produits psychotropes (alcool compris) dans un contexte festif disparaîtra. Elle fait partie de nos cultures, de nos rites de passage modernes, d’une forme de détente ou encore d’expérimentation.
Le contexte prohibitif actuel porte fortement préjudice aux publics festifs. D’une part, il engendre une consommation cachée, passée sous silence et donc souvent réalisée dans des conditions qui font prendre des risques aux consommateur∙rice∙s. D’autre part, il restreint les possibilités d’encadrement sain et bienveillant de la part de professionnel∙le∙s de la santé dans les lieux festifs.